Reporting Through Burundi’s Coup: A Q&A with Ines Gakiza

by    /  October 26, 2016  / No comments

Les journalistes ont longtemps été sous pression au Burundi, bien que la situation s’est agravée au cours des dernières années. En 2013, le Président Nkurunziza a promulgué une loi qui interdisait les rapports sur les questions qui pourraient «compromettre la sécurité nationale, l’ordre public, ou l’économie.” Le climat hostile de la presse a atteint un point de basculement deux ans plus tard, quand un coup d’Etat éclata lorsque le président Nkurunziza briguait un troisième mandat constitutionnellement interdit. Trois stations de radio et une de télévision ont été détruits par les policiers et les militaires.

Une Journaliste de la radio burundaise Ines Gakiza travaillait à la station privée et indépendante, Radio Publique Africaine (RPA), la plus écoutée de la station au Burundi. Lorsque la station de l’RPA a été détruite pendant le coup d’Etat, Ines a quitté le pays avec beaucoup de ses collègues. Depuis le mars, 2016, Ines Gakiza étudie à Hambourg en tant que récipiendaire du prestigieux Hamburger Stiftung für politisch Verfolgte (Fondation de Hambourg pour les Personnes Victimes de Persécutions Politiques), où elle continue aussi a travailler en ligne pour la RPA. Elle termine actuellement ses études à l’Université de Hambourg et espère revenir au Burundi en 2017. SampsoniaWay.org a parler avec Ines de son travail avec la RPA, la liberté de la presse du Burundi, et comment elle contribue à construire l’avenir du pays.

Quelle a été votre expérience avec la RPA en tant que journaliste débutant sa carrière?

J’ai commencé par un stage en 2009, du premier juin au 31 décembre. Parce que la j’étais encore a la faculté, j’ai du stopper après les six mois de stage pour retourner pour en finir avec mon travail de mémoire. Puis, je suis retournée en mars 2011 après la présentation de mon rapport, et je suis là depuis donc mars 2011, jusqu’à aujourd’hui. 

C’était intéressant, un peu intimidant quand-même. Au centre de notre radio, il y avait un esprit particulier de confraternité. On était un peu soudé parce que la RPA c’était un radio un peu spécial par rapport aux autres radios de mon pays. C’était beaucoup plus apprécié par la population mais aussi qui n’était pas trop aimé par le régime en place. On était un peu soudé, c’était une famille spéciale dû aux conditions de notre travail. Donc, je dirais que j’ai de bons souvenirs de la RPA de quand on travaillait encore au pays, et même aujourd’hui, les journalistes avec qui nous sommes, nous avons gardé notre esprit malgré les conditions difficiles et la séparation.

C’était un autre monde pour moi. Trop de découvertes, trop de voyages, mais c’était intéressant et j’ai appris beaucoup de chose. Et surtout j’ai rencontré des gens formidables qui aimaient leur travail avec un esprit un peu particulier qui m’a fait aimer le métier de journalisme. J’ai dû découvrir beaucoup. Que ce soi des localités de mon pays que je ne connaissais pas.J’était un peu jeter a me confronter à des scènes qui n’était pas familiers. Par exemple, s’il fallait aller faire un portage sur un cadavre découvert quelque part, il fallait y aller voir de mes propres yeux le cadavre pour pouvoir décrire la façon dont la personne a était tuée. Quand même ça c’était un peu un choc pour moi. Mais c’était intéressant. Ça m’a fait aimer le métier de journaliste. 

Chez nous, peut-être que c’est pas comme dans d’autres pays. Chez nous, généralement, on n’a pas de spécialité dans un domaine. Donc un journaliste touche tout les sujets, mais quand même il y a des fois où tu te sens plus intéressé, plus fort dans un domaine que dans un autre, et là tu-t’y intéresse beaucoup plus. Sinon, on faisait un peu de tout : que ce soit la sécurité, l’économie, la justice, les droits de l’homme, on touchait à tout, ce qui nous faisait acquérir beaucoup de connaissances dans différents domaines. Personnellement, j’aimais un peu plus des rapportages en rapport avec la justice, je sais pas pourquoi, mais c’est ce qui m’a tiré le plus. Sinon, j’ai fais un peu de tout, que ce soit documenter des évènements, que ce soit les enquêtes par rapport à des sujets de sécurité, droit de l’homme, économie, je faisait un peu de tout. Je dirai, tout ce que j’ai jusqu’à aujourd’hui à la RPA, j’en sui fière.

Comment est-ce que les portables, et leur haute utilisation, influencent la façon dont les nouvelles et les informations sont partagées au Burundi? Comment ces réseaux et outils affectent le travail que vous faites et le statut des journalistes au Burundi?

La technologie nous est d’une grande utilité ces temps-ci. Quand nous avons lancé le magazine d’information, le seul moyen efficace pour le partager à un grand public qui avait soif des informations sur ce qui se fait au Burundi, a été sur les réseaux sociaux et ça nous aide à toucher pas mal de personnes, vu que les smartphones sont répandues. Mais là aussi, il existe des gens qui ne les utilisent pas, donc on poste le magazine sur le site de la radio (www.rpa.bi). Et depuis juin de cette année, on a fait un grand pas en avant, le magazine est diffusé sur Short Wave, et on est entendu partout dans le monde sur le SW bande 19metre, fréquence 15480khz, chaque soir de 20h à 21h, heure de Bujumbura. Avec cette avancée, on parvient à toucher, nos frères et sœurs burundais de la campagne, qui n’ont pas internet et smartphones mais qui ont des postes radio a système SW.

Avez-vous jamais dû vous censurer vous-même? Pourquoi? Et si non, pourquoi pas ?

Oui, je me suis déjà censurée et pas une seule fois. Des fois, je reçois des informations bien vérifiées mais que je ne peux pas divulguer au nom de certaines règles. Ici, l’exemple sans trop de détails que je peux vous donner concerne des informations que j’ai déjà reçues qui, une fois diffusées auraient touché au principe du secret militaire. Donc, on ne regarde pas seulement qu’on est en règle avec notre métier, il y a d’autres considérations pour le bien du pays.

Selon vous, en quoi est-ce que le gouvernement profite par l’emploi de la censure?

En censurant, le pouvoir limite le champ d’action des journalistes. Donc, ils créent des zones interdites aux journalistes, qu’ils essayent de protéger. Je dirai que la censure, c’est pour se protéger, pour qu’on ai peur, pour qu’on ai pas le droit de toucher à tel sujet, peut-être qu’il nous met mal-à l’aise. C’est comme ça que j’interprète la censure, qui n’est pas justifiée.

Si on censure abusivement, c’est tiré, à petit pas je dirais, cette population vers la non-information. Parce qu’en limitant les domaines sur lesquelles les journalistes peuvent travailler, c’est qu’on veut pas que ces domaines soient portés à la connaissance du peuple. Donc c’est les garder dans l’ignorance, dans la non-information, parce que le journalisme non seulement on met à jour ce qu’on ne voit pas, mais également, il y a de l’information, de l’instruction, dans le travail de journalisme. Non seulement on informe, mais aussi on éduque la population. Si vous censurez, vous tirez votre peuple vers la non-information, l’ignorance.

Quel a été l’effet du vide d’information sur les manifestations en Mai 2015, et même avant en Avril ? Si le média n’avait pas été coupé, selon vous est ce que le développent et le dénouement du coup auraient été différents ?

L’effet du blackout lors des manifestations, je dirais a permit aux criminels de tuer en silence, sans que personne crie au secours. Vu le régime qui est au Burundi actuellement, ces radios qui ont été détruites, étaient devenues pour la population un canal pour crier au secours. Donc, c’est comme le pouvoir avait préparé les lignes de répression sanglantes de ces manifestations. C’est très normal, de leur part, et logique d’avoir commencé par détruire ces radios. Comme ça, la population ne pouvait plus crier au secours. Donc sans ces medias, ils n’avaient plus le principal canal qui servait à crier au secours pour eu. Donc vous pouvez comprendre que, les dégâts qui ont eu lieus, peut-être, et je suis presque sure à 100%, n’auraient pas eu lieu si les radios fonctionnaient toujours.

Le 25 avril 2015, Président Nkurunziza annonce qu’il poursuivra un troisième mandat. La journée suivante, les manifestants descendent dans les rues. Et le 27, des chefs civils sont arrêtés et les bureaux de RPA sont fermés. Quelle a été votre expérience pendant ces 72 heurs?

Ce sont des souvenirs pas agréables, des journées trop bousculées, tendues et stressantes. Je me rappelle le fameux 25 Avril, c’était un Samedi, on attendait tous l’annonce, c’était prévisible ce qu’il va annoncer, mais c’était comme un sifflet de départ vers les catastrophes. Donc, j’avais quand même peur, les burundais avaient peur. Ce soir, j’étais sur la présentation de la soirée, le journal ne tournait qu’autour de cela, différentes interventions pour décrier cette attitude qui ne menait le pays que dans le chaos.

Le lendemain, je suis partie tôt sur terrain pour suivre le début des manifestations, dans un des quartiers, on s’était dispatché dans différentes localités. Des manifestations timides les premières heures, parce que se soit les manifestants. Que ce soit les policiers, personne ne savait encore jusqu’ou l’autre camp peut arriver. Au fur du temps, la violence policière s’est accrue, commencer à tirer a balles réelles sur les manifestants. Ce n’était pas facile, nous, journalistes, on restait au milieu entre manifestants et policiers et ces derniers n’hésitaient pas à nous assimiler aux manifestants en pointant sur nous des grenades lacrymogènes. On était dans une situation pas facile, se protéger mais également essayer de tout suivre.

Mais la également, vers 11h, il y a eu première tentative de fermeture de notre radio. Quand, j’ai appris que trois ministres étaient à notre station, j’ai quitté le terrain pour y aller, tout comme mes confrères qui étaient dans d’autres quartiers. Ce jour-là, ils n’ont pas pu y arriver, mais ils nous avaient déstabilisés dans nos activités. Et c’était pour nous de la Radio publique africaine, un signe que les choses ne seront pas faciles pour nous. Le lendemain lundi, je suis retournée encore une fois dans le tour des différents quartiers, confrontée aux mêmes risques décrits ci-haut, mais en début d’après-midi alors, on a ferme finalement la station

Qu’avez vous fait le jour du coup en Mai 2015?

Le jour du coup d’état, le 13 Mai, comme je vous l’aviez dit, les putschistes, nous ont exigé d’ouvrir, nous avons repris les programmes, je suis donc partie à la station ou j’ai rencontré presque tous mes collègues après quelques jours au chômage, une foule est venue manifester sa joie devant nos bâtiments. Je me souviens, ce n’était pas aussi facile, le coup n’était pas encore réussi avec les heures, on ressentait que ce sera terrible pour nous, qu’ils s’en prendront a nous aussi. J’ai quitté la station vers 22h, parce que le lendemain, j’étais programmée pour présenter le journal matinal. Le chauffeur est venu me prendre 4h du matin, avec 3 autres collègues qui étaient de l’équipe matinale. Des coups de feu retentissaient, c’était notre station qui était attaquée. Les putschistes avaient laissé une petite garde militaire à notre station, ils ripostaient à l’attaque. Mais les attaquants étaient nombreux à eux et lourdement armés, aucune intervention n’était possible, car nous étions attaqués par le pouvoir qui avait repris les choses en main. On a été averti a temps, nous ne sommes pas partis directement à la radio. Cette aube-là, on s’est caché quelque part en ville pour attendre que le jour se lève, surtout on espérait que l’attaque ne serait pas aussi méchante. Vers 9h, les coups de feu ont cessé, nous sommes allés voir, on ne pouvait pas arriver à notre station, des policiers avaient fait des barrières, eux gardaient un bâtiment en feu…. Apres attaque, ils ont cherché de l’essence et ont brûlé le bâtiment et tout ce qui était à l’intérieur a été calciné…

Après le coup d’Etat, les journalistes burundais ont commencé à être très préoccupés par les présumées listes de ciblages procurées par le gouvernement. À votre connaissance, étiez-vous ou l’un de vos collègues nommés dans ces listes?

Les listes qui ont été connues en premier, parlé de ceux qui étaient accusés d’avoir participer au putsch. Sur 34 de la liste, 7 sont des journalistes dont 2 de ma radio. Plus tard, après le lancement de notre magazine d’information, on a reçu des informations que le pouvoir prépare l’assassinat des journalistes de ce magazine, et la liste qui nous a été communiquée, je fais partie.

Comment êtes-vous arrivé à la décision de quitter le Burundi? Avez-vous envisagé de rester et de travailler dans la clandestinité comme beaucoup d’autres journalistes ont fait?

Deux jours après la destruction de notre station, moi et quelques collègues, nous sommes allés constater les dégâts. Arrivés sur place, que de la cendre, ça attestait la haine que ce pouvoir a envers nous. J’ai réalisé qu’il n’y avait plus d’espoir pour nous dans ce pays avec ce régime. Ce soir même j’ai décidé de partir, et le lendemain matin suis partie, la peur au ventre. Tous les vols avaient été suspendus suite au coup d’état, donc le seul moyen de quitter le pays n’était que la voie routière, avec tous les risques… Mais heureusement, j’ai pu traverser sans incident.

Y avait-il jamais un moment où vous considéré d’abandonner le journalisme afin de préserver votre sécurité personnelle?

Malgré ces risques, l’idée ne m’a jusqu’ici jamais traversé l’esprit. C’est un métier noble, c’est juste de mauvais régime, les temps finiront par changer.

Je dirais que la motivation, la détermination malgré ces risques provient de la grandeur, de la valeur de l’objectif poursuivi. Oui, les risques étaient réelles, certains de mes collègues ont déjà vécu cela : emprisonnement, contrainte de quitter le pays, vivre clandestinement … mais, mourir on finit toujours mourir, la grande devise sur cette vie, c’est d’essayer d’être bénéfique pendant ce séjour ici-bas.

Dans l’article que vous m’avez envoyé, vous avez dit que vous aimez votre travail en tant que journaliste «parce qu’il sert les gens au Burundi», comment avez-vous entretenu cette responsabilité à l’étranger?

Je suis ici en Allemagne depuis fin Mars. Je venais de passer 10 mois au Rwanda, j’étais au refuge avec l’éclatement de la crise. De Rwanda, je travaillais aussi : on a commencé, on a relancé nos activités quand on été au Rwanda au début de la crise. Donc de là, on avait déjà recontacté nos sources, parce qu’avec la crise on venait de passer un temps au chaumage après la fermeture de la radio il a eu coupure avec nos sources. Après qu’on a relancé l’activité au Rwanda, on a recontacté nos sources. On a repris les activités. Après qu’ils nous ont entendu encoure une fois a travers le magazine, même nos sources qui avaient disparus, ont repris contact. Ils avaient repris confiance parce qu’ils avaient entendue que c’était la RPA, c’était les mêmes journalistes, on a gardé nos noms. Donc on a renoué les contacts.

Je dirai que depuis mon exile, j’ai élargi mon carnet d’adresse par rapport à ce que j’avais au Burundi. Donc, même d’ici, je continue a travailler comme je le faisais au Rwanda, où même là j’étais pas sur place. On reçoit les informations de la part de nos sources, et on essaye de vérifier par d’autres sources, parce que c’est délicat quand même de travailler à l’écart ; ça demande beaucoup plus d’attention et de vérification pour qu’on soit pas manipulé ou entrainé à diffuser des fausses informations.

Cette année, le gouvernement burundais a énuméré les noms des sept journalistes burundais vivant en exil et a appelé à leur rapatriement pour leur implication présumée dans le coup. Pourquoi le gouvernement continue-il de cibler les journalistes, même quand ils ont quitté le pays?

Le gouvernement s’en prend toujours aux journalistes parce qu’ils ont vu que même si ils ont détruit les radios, ils ne sont pas parvenus à leur fin. Ils pensaient se débarrasser des journalistes mais nous avons été délocalisés, menacés, déstabilisés mais quand même on tient toujours le coup, on travaille toujours. Donc pour eux, la menace qu’on présente existe toujours…

Quels sont les projets sur lesquels vous travaillez en ce moment?

Présentement, je finis les cours. Parce que je viens d’un pays francophone, j’ai commence par améliorer mon Anglais. J’ai suivis des cours d’anglais ici à l’université de Hambourg. Mais, après je finis ce mois si. Le mois d’aout je pense, je cherche un stage dans un autre media ici, pour perfectionner mon professionnalisme dans une radio plus développée que la mienne. Je profite de ces séjours ici pour avoir d’autres expériences dans d’autres medias, d’autres milieux. Et puis, à la fin de ma bourse, mon souhait de rentrer chez moi. Je ne sais pas encore si cela serrait possible, mais je préfère rester optimiste et pense que d’ici l’année prochaine, je pourrai enfin rentrer chez moi, travailler pour mon pays et concitoyens, et au développement de mon pays, et partager mes expériences de ces séjours.

Comment les médias libres pourraient-ils apporter la paix et la résolution dans ces conflits durables au Burundi et dans d’autres pays?

Les medias libres c’est les medias qui ont l’autorisation, qui ont l’indépendance de pouvoir exercer professionnellement leurs métiers. Les medias c’est comme un canal d’information, mais également, c’est travailler librement, et étant dans le pays, en situation de crise d’abord, c’est avoir accès a toutes les sources d’information, pouvoir investir, aider, les institutions de l’état, bien sur s’ils ont la volonté à découvrir certaines vérités de ce qui se passe, informer la population. Donc, media indépendant, c’est un canal de communication d’abord entre les concitoyens, entre les protagonistes, sans qu’on soit accuses de prendre un cote parce qu’on donne la parole à tel, et que peut-être les gens au pouvoir refuse de communique aux opposants, ce qui n’aide pas a résoudre une crise. Pour qu’une crise soit résolue, il faut qu’il y ait communication, d’abord entre franchises, et c’est par la communication, c’est par ce libre mouvement qu’on est mené à la vérité. Il y a des vérités qui ne sont pas dévoilés au premier coup, qui sont découverts petit-à-petit. Donc, en tant que journaliste qui a évolué dans un pays qui a connu beaucoup de crises, je dirai que les medias aident toujours à résoudre des situations de conflit. Et voilà, maintenant que ca fait déjà plus une année que la Burundi est en crise, il n’y a pas de media. De la ou nous sommes, on se bat pour continuer à informer nos concitoyens, mais malheureusement, le pouvoir en place ne peut pas nous accorder des paroles. Même de la ou nous sommes, il y a ceux qui continuent a nous demander qu’on transmets leur cri d’alarme, leur cri de secours. Mais malheureusement, on ne peut pas toucher l’autre camp pour donner la réponse à ce peuple malheureux.

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